Ma sortie à la Play, soirée destinée aux novices du vice

play dèmonia performance Shibari
photo Hervé Photograff

Cela fait bien longtemps que je ne suis pas sortie, j’en ai bien envie ! Une amie m’invite à la Play, évènement organisé par Dèmonia à Paris. C’est le moment pour moi de reprendre contact avec le milieu BDSM. Enfile ce slip de cuir et ce collier, je t’emmène au débotté en soirée. Au pied ! Suis-moi.

J’ai passé l’après-midi à dévergonder Raphie, mon puceau, à l’occasion d’une longue séance bien pimentée. La sauce spicy sur une bite irritée par un brossage énergique, ravit mon joyeux sadisme. J’ai aussi transformé ce pov puceau en toutou de Tata Gladys. Heureusement, Raphie est un jeune homme prévoyant, il apporte toujours brosse à dents et dentifrice. Repartir de chez Maîtresse avec de la pâtée pour chien coincée dans les gencives… moyen ! Se sortant les doigts du c… (pour une fois), Raphie s’est fendu d’un compte-rendu soigné. Je le publierai bientôt sur le blog, les clichés raffinés le seront sur ma galerie secrète, page cachée de mon site à laquelle tu n’auras accès que si tu es abonné à ma newsletter.

Après cet instant d’auto-promo à ma gloire internationale, reprenons. Le soir arrivant, me voilà en route pour la Play, version moins tardive (20h-2H) de la célèbre et antédiluvienne Nuit Dèmonia, l’évènement fétichiste aux tenues latex vinyle cuir les plus excentriques… Dans les rues du Marais, ce premier soir d’automne sent encore la légèreté des beaux jours d’été, les terrasses s’affichent blindées. À la porte du Théâtre du Renard, un jeune homme m’accueille aimablement, ça change des physios qui se la pètent… Je laisse mon blouson au vestiaire, il suffit d’être habillé au minimum en noir, le dress code de la Play est moins à cheval que celui de la Nuit Dèmonia. Je porte une jupe et un top en mailles noirs décorés de mini boules de métal, un ensemble de marque vanille, classique quoi. J’ai juste ajouté un serre-taille fetish et le tour est joué. Pas besoin de se changer dans un coin mais ceci est possible si l’on souhaite apparaitre en tenues extravagantes.

J’entre. C’est une belle et vaste salle du théâtre, avec de grands panneaux lamés lumineux et des arabesques bleues au-dessus d’une petite scène. Il n’y a pas de sièges, ce qui dégage bien l’espace. Un haut plafond permet des coursives aux balustrades de fer forgé. Le thème de cette Play : le shibari. Ça te dit quelque chose ? C’est du bondage nippon. Cette technique très esthétique fait fureur. Sa popularité a dépassé la sphère BDSM pour émoustiller les bobos parigots. Désormais des spectacles bien comme il faut se donnent une touche sulfureuse avec une scène de shibari.

Pour cette pratique, sont disposés deux portants qui permettent d’attacher et de suspendre un modèle dont l’un avec une poutre en bambou. J’aperçois aussi un banc à fessées, intéressant… Une grande cage, deux belles croix de Saint-André décorées de dessins psyché, on ne va pas s’ennuyer !

Dès l’entrée, l’association PariS-M a installé son stand. Ses bénévoles mettent à disposition lingettes et gel désinfectant, gants médicaux, capotes, même s’il n’y aura pas de sexe conventionnel ce soir, on n’est pas au Cap D’Agde ici, n’est-ce pas ! Mais ceci peut servir pour des sex-toys ou un doigtage impromptu. Il y a aussi tout un tas de dépliants très instructifs si tu es novice sur l’hygiène et la prévention autour des pratiques extrêmes. PariS-M organise tous les mois diners-débats et apéros virtuels ou en présentiel sans chichi et en tenue de ville. L’association monte aussi des ateliers, je m’y étais inscrite fut un temps, j’avais suivi celui consacré aux jeux de couteaux, et celui sur les liens sans cordes… Idéal pour approcher le milieu, découvrir ses codes pas à pas. Ça t’évitera de te retrouver du jour au lendemain les fesses et le dos zébrés de traces de fouet alors que tu pars le lendemain en séminaire d’affaire à Singapour. Je vois des sachets de bouchons d’oreille aussi. « C’est pour la privation sensorielle » m’explique la jeune femme de PariS-M « ou bien pour la musique trop forte ». Ou pour ne plus entendre les blablas des soumis trop loquaces !

play bdsm party shibari

Ah ! Mon amie Clarissa Rivière est là ! C’est elle que je suis venue rejoindre ici, elle avait une place en trop pour la Play et me l’a offerte. Sacrée Clarissa ! Reine discrète des nuits frivoles ! Quand tu la rencontres la première fois, tu as du mal à croire qu’une femme à l’allure si sage et distinguée, écrive des histoires si olé olé. Clarissa est une autrice reconnue de littérature érotique. Son dernier opus Le Village des soumises (éditions Tabou) se déroule dans un club de vacances dédié aux pratiques BDSM, quelle bonne idée ! Clarissa tient aussi un blog sur ses sorties, ses lectures, ses voyages et elle y publie l’agenda des soirées, bien pratique ! Voilà qu’elle me présente son fameux soumis qui au départ ne devait pas venir, Clarissa m’a alors donné sa place. Après s’être désisté, il s’est ravisé, oui puis non puis oui, souvent soumis varie. À ne pas confondre avec « soumis varice » n’est-ce pas, ça c’est le surnom de Oignon le fétichiste des chaussures Schöll, mais je m’égare…

La Play commence à se remplir, les gens bavardent, admirent les tenues lookées, une domina de latex tient sa Sissy soubrette. Personne ne danse, à part un puppy avec son masque de chien et son harnais de cuir. Il se déhanche tout fou sur Sister of Mercy et New Order.

Clarissa me présente JB BUDA le DJ. Avec ses colliers de perles et ses piques lumineux sur la tête, il ressemble à un bouddha néohippie ou encore un tamagoshi barbu. C’est l’organisateur des Hell’O Kinky, soirées sexpositives décalées et décadentes. Bien, bien… des soirées avec une touche BDSM donc. Oui et non… tout en caressant les boutons de sa table de mixage, le sympathique JB m’explique que ses évènements se veulent le plus inclusifs possible, tous les genres et toutes les sexualités se mélangent, et il y a pas mal de jeunes. Le dress code est moins formel que ce soir « on peut venir habillé en licorne ou en lapin, mais tu peux aussi porter du cuir ou du latex, l’important c’est de se déguiser, d’être soi-même et de kiffer. Je suis un grand fan du Kitkat, club electro fetish de Berlin, je mixe régulièrement là-bas. J’ai voulu recréer cette atmosphère sans pression, sans attente des participants. On est juste là pour profiter, pas pour consommer des pratiques à tout prix, même si tout est possible. À Berlin, il y a moins de cases, d’étiquettes qu’ici, ils n’hésitent pas à mélanger les tribus. Par exemple j’avais participé à une soirée mixant BDSM et burlesque sur le thème de Star Wars, faut oser ! » Pour avoir fréquenté fut un temps le mythique Kitkat, j’ai toujours été déçue par les soirées parisiennes qui tentaient de reproduire cette magie. Paris n’est pas Berlin, latins VS germains. Peut-être faudrait-il qu’à l’occasion je traîne mon martinet et mes talons à la Hell’O Kinky, juste pour vérifier bien sûr… Tu veux venir ? Tu vas m’encombrer, c’est sûr. Ou alors si tu es assorti à mon sac arc-en-ciel et que tu portes un plug avec une queue de licorne… Faut voir.

J’ai soif, je me prends un jus de pomme et je fais la connaissance de Joris le responsable des soirées Dèmonia. Il m’éclaire sur le concept des Play : elles sont faciles d’accès, sécurisantes. Selon Joris « l’idée c’est que les timides, les débutants se sentent à l’aise à un horaire moins tardif dans une ambiance assez intimiste. Il n’y a pas de photographes. Les novices peuvent discuter avec les plus aguerris qui les conseillent, les guident, leur apprennent les codes. Eux ce sont les ambassadeurs et ambassadrices dont vous faites partie Madame Gladys. » Appelez-moi désormais Madame l’Ambassadrice. Je vais dépraver les petits nouveaux, les dépiauter comme des Ferrero Rochers  ! La mission devrait rentrer dans mes cordes nouées ou non !

play demonia bdsm croix de saint André

Oh lui ! je crois que je le connais. j’ai un doute, ça fait longtemps… Soit je lui claque la bise soit je lui claque autre chose…  Oula ! J’ai bien fait d’être prudente. C’est D’Ange qui est Maître et ce soir, il vient attacher sa soumise devant tout le monde. C’est un super attacheur qui a monté l’école Corps à cordes. J’y suis allée une fois, D’Ange est très pédagogue. Hélas, je n’ai pas le temps de me consacrer à fond à cet art érotique et spirituel très particulier. Il me faudrait des journées de 36h. Pour une séance 100% shibari, je t’enverrai chez l’une de mes copines, Dame Albane et Minsungui, attacheuses de haut vol.

Néanmoins, snob et perverse, je m’intéresse au Japon et je vais donc chausser mes lunettes de professeuse que tu aimes tant, pour une petite leçon d’histoire : à l’image des arts martiaux, le shibari est une école de patience, de persévérance, d’humilité… Née au XVe siècle au Japon, cette technique de torture était utilisée par les samouraïs sur leurs prisonniers. On attachait ses ennemis différemment selon leur classe sociale. Son utilisation a dérivé jusqu‘à devenir un moyen de méditer, puis une pratique artistique et sadomaso au XXème siècle. Les cordes sont en jute ou en chanvre, les nœuds sophistiqués, les modèles se retrouvent attachés ou suspendus dans des positions inconfortables, et les attacheurs sont reconnus comme de véritables virtuoses. Pour en savoir davantage, regarde le film Planète Kinbaku, kinbaku est un terme plus précis que shibari pour parler de bondage érotique.

Ça y est ! les performances de la Play commencent. D’Ange saucissonne sa soumise avec des cordes rouges, trop stylé comme disent les jeunes ! Le geste est précis, concentration maximale, les doigts connaissent par cœur des nœuds faits et refaits des milliers de fois. Sur l’autre portant, une attacheuse cette fois, Ombre Anatkh s’occupe d’une femme, toutes deux sont habillées de chics kimonos. La modèle ne tarde pas à se retrouver la tête en bas, les pieds en l’air. Aérienne et splendide !

Une adepte me raconte que ça lui fait un bien fou de se faire attacher. C’est mieux qu’une méditation « ça me dénoue le cerveau. » Ce n’est pas toi cher soumis qui va dire le contraire n’est-ce pas ! Que ce soit avec des cordes, ceintures ou des chaînes, c’est paradoxal, attacher permet un détachement intérieur. Et parfois dans la douleur ! J’aperçois un jeune couple, la fille est suspendue en partie par les bras qu’elle tient tendus en arrière dans le dos, ça doit faire un mal de chien aux épaules. Du pur masochisme ! « Elle adore ça » me glisse Clarissa, « ils sont connus dans le milieu ». Mieux vaut avoir de l’expérience, ça peut être dangereux, sans parler de faire tomber la partenaire, elle peut se coincer le nerf radial du bras dans un mauvais encordement, et rester paralysée plusieurs semaines. Fâcheux !

Les croix de Saint-André de la Play sont toutes occupées par des soumises offrant leur postérieur à des Maîtres fouetteurs. L’un d’eux, Balthazar pratique la flagellation à la florentine, un martinet dans chaque main, il les fait tournoyer avec harmonie, il jonglerait presque avec. En revanche, je vois peu de Dominas en action, à part une Maîtresse se servant du portant pour se tenir et écraser, allongé à ses pieds, un soumis exultant.

Je tombe sur Ness avec dans sa valise ses précieux fouets. Ness est la patronne des célèbres Goûters du Divin Marquis qui ont lieu tous les vendredis après-midi, depuis 20 ans, qu’il vente ou qu’il neige. Une institution ! Faut vraiment que j’y passe, l’ambiance y est toujours très bon enfant, « familiale » me précise Ness. La Dame organise aussi une soirée par mois : Les Folles Nuits du Divin Marquis. Peu de femmes sont à ce point impliquées dans l’organisation régulière d’évènements BDSM. Il faut du courage et de l’autorité, le monde de la nuit n’est pas des plus cléments.

Les gens regardent les scènes depuis les balustrades des coursives, je veux en faire autant. Surprise ! Bien cachée, une grande mezzanine est très animée. Il s’en passe de belles ici ! Sur un sling un Maître fiste tranquillement sa soumise. Quoi de plus normal ! Il y a un grand banc à fessées et encore un portant à shibari. Une femme se fait caresser la cuisse par son voisin de canapé, pendant qu’elle piétine un soumis avec nonchalance. Un autre afficionado du peton, un bonnet à crête en latex, se concentre plein de dextérité. Je me laisserais bien tenter…

Je tombe encore sur de vieilles connaissances que je n’avais pas croisées depuis bien longtemps : « Tu n’as pas pris une ride ! » Et pourtant, le temps passe si vite…  Je n’ai toujours pas joué, je suis venu sans jouet, babiole type martinet ou fouet + joujou vivant à attacher, exhiber, cagoulé ou non (pour l’anonymat, si tu as peur de tomber sur un collègue de bureau). Il faudra y penser. Ou pas.

L’ambiance de la Play est à son acmé. Clarissa s’est déjà envolée vers d’autres plaisirs… Peut-être qu’il faudrait que je mette les voiles. Façon de parler tu as compris bien sûr ! Pour l’instant, je n’ai jamais enfoncé un mât dans les fesses d’un soumis allongé sur le ventre, belle image pourtant ! Pour me sortir de ma rêverie, tente de faire diversion dans mon champ de vision, un peu lourdaud, un soumis habillé de chaînes sur le torse. Je fais comme si je ne le voyais pas, mais je l’observe tortillant du troufion…

Un autre jeune homme fringué plus conventionnel m’aborde. Il tente d’engager la conversation. Un peu gauche : « vous venez souvent ici ? » dure condition de l’homme esseulé en soirée… Voilà un beau spécimen de novice (no vice, il en a pas ou peu pour le moment donc). Il veut en savoir plus, moi aussi : a-t-il déjà déterminé ses kinks comme on dit maintenant pour faire branché, ses envies quoi ? Dominant ou soumis ? Je glisse que je suis Maitresse Gladys, soudain son visage s’éclaire : « c’est vous ? Incroyable ! Je vous ai vu sur le net. » Grande vedette que je suis ! Et surtout, je comprends vers quelle tendance le « malheureux » s’achemine. Le freluquet finit par me tutoyer, ça méritera punition. Il se reprend : « Dans vos séances, êtes-vous sévère ? » Joviale et implacable, douce et ferme. La fusion des extrêmes enclenche le lâcher-prise jusqu’à l’extase, mon ptit bonhomme ! « Qu’est-ce que vous aimez comme pratiques ? » Elles sont secondaires, l’important c’est le lien entre le soumis et Moi. Me voilà dans mon rôle d’ambassadrice pédago prédatrice ! Un agréable étourdissement me saisit, je cède au tourbillon de la fête. Quelle joie de retrouver ma famille de damnés ! Moments suspendus avec ou sans cordes…

Je rentre chez moi un peu en vrac. Encore dans l’excitation, j’ai bien du mal à trouver le sommeil. Et le week-end n’est pas terminé. Le lendemain dimanche, j’ai rendez-vous chez Maîtresse Balkis pour le goûter. J’ai hâte de découvrir son nouveau lieu, une future école de Sissys, si si je t’assure. Chez moi, ce sont plutôt des Puputes destinées à la gaudriole. Chez Madame Balkis, les Sissys sont aussi des mâles biologiques motivés à se travestir en jouvencelle, mais ils doivent apprendre dans les moindres détails les rudiments de la vie d’une soumise au service des Dames : chasteté imposée, service sous la menace de sévices, chauffeur pour les déplacements de Maîtresse, débauche sur commande, tâches ménagères – un grand défi pour Madame Balkis, les soumis sont toujours persuadés d’en avoir la science, alors qu’ils sont tout à fait médiocres – et enfin, compétence fondamentale d’une Sissy : être agréable au regard, porter des tenues féminines, jupes, talons, string, porte-jarretelles… toujours au poil ! Mais sans poil. À l’heure où je pénètre dans le bel appartement haussmannien, je trouve allongée et attachée sur la table d’auscultation, Sissy Emmanuelle déjà bien avancée dans son curSuce. La voilà en train de subir la cire dépilatoire. Toujours impeccable et classe, Madame Balkis a une méthode bien à elle pour étaler la pâte collante et l’arracher. Et j’avoue que j’ai trouvé cela fort ludique. Un sentiment peu partagé par Mademoiselle Emmanuelle, surtout au moment où mon Amie m’explique comme bien épiler le torse du soumis-soumise. Ecoute le mini-podcast.

Heureusement Maîtresse Balkis possède une belle collection de bâillons ! La Sissy life, c’est un peu comme le métier de comédienne ou de star de la téléréalité : beaucoup en rêvent mais peu y parviennent. Prends garde à toi poulette velléitaire ! Paradoxalement il faut en avoir des castagnettes pour supporter un tel traitement !

Prochaine Play Demonia : 24 octobre à l’occasion de la Fetish Week 

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