Le Masochisme au cinéma : le livre culte réédité pour Noël

Le Masochisme au cinéma Jean Streff

Pour les fêtes, je t’ordonne de te faire ce cadeau qui enrichira ton âme et ta bibliothèque secrète. Il s’agit du livre Le Masochisme au cinéma de Jean Streff qui vient d’être réédité chez Rouge Profond. De Luis Buñuel à Federico Fellini, le 7ème art n’a pas manqué de mettre en lumière nos pratiques favorites. Un ouvrage mythique et passionnant qui fait la part belle aux dominatrices et aux hommes soumis. Et ça fait bien plaisir…

Le Masochisme au cinéma a connu quelques déboires. À sa sortie en 1978 chez l’éditeur Henri Veyrier, le livre jugé trop sulfureux, a été frappé de censure ( Ah ! frappé, pour un essai sur le sm, ça commençait bien). Comme quoi, si Giscard était le président de la libération des mœurs, il ne fallait pas trop pousser quand même. « Le mélange entre plaisir et pouvoir est considéré comme la pire des ignominies », écrit l’écrivain et réalisateur Jean Streff. De Libération au Canard Enchainé, en passant par le Nouvel Observateur, la presse se mobilisa alors en sa faveur. Mais il faudra attendre 1982 pour que Jack Lang, nouveau ministre de la culture, lève les interdictions.

Comme tu ne penses qu’à tes fesses, tu vas être servi, ces écrits parlent principalement de soumission masculine, Jean Streff ne faisant pas mystère de ses goûts personnels. Et puis comme l’auteur le souligne, le renversement des rôles joués dans la société, est beaucoup plus transgressif en termes de jeux de pouvoir. Cependant, un chapitre évoque tout de même les femmes masochistes.

Ne te méprend pas ! Le Masochisme au cinéma n’est pas une liste d’oeuvres où figurent des scènes BDSM. C’est plutôt une explication des différentes pratiques illustrées par des centaines de films.

Par exemple, le masochisme servile est mis en scène dans Diaboliquement Vôtre en 1968 où Alain Delon est victime de la machination d’une femme et de son serviteur. Streff écrit « on le voit, à genou devant son idole, rouler délicatement les bas sur ses jambes fuselées et, brûlant de désir, masser le corps nu de la jeune femme sans jamais y attarder la main. On le voit nettoyer amoureusement ses escarpins, tailler ses robes sur un mannequin à ses mesures, coudre sa lingerie la plus intime ou bien encore laver et étendre ses slips souillés. »

Plus loin, l’auteur évoque les tortures des parties génitales et cite en référence « le geste final de Gérard Depardieu dans La Dernière femme (Marco Ferreri, 1976), qui se tranche le sexe avec un couteau électrique (…) la victoire de Thanatos sur Éros dans la lutte qui oppose et confond l’instinct de mort et l’instinct sexuel. »

Tu (re) découvriras le masochisme puéril appelé aujourd’hui « nursing » ou « ABDL » dans les films de Fellini, le fétichisme du pied et de la chaussure chez Buñuel ou encore St-Maso, « l’autoflagellation et autres pénitences des religieuses ont fait l’objet de nombreuses séquences cinématographiques. » Des chapitres sont aussi consacrés aux automutilations et self bondage ainsi qu’au BDSM dans le cinéma fantastique et les péplums.

Le Masochisme au cinéma
Françoise Dorléac et Donald Pleasence dans Cul de Sac (Roman Polanski, 1965)

Mais pas de torture possible sans les reines du domaine sm. Deux chapitres sont dédiés aux dominatrices, il fallait bien cela pour nous rendre hommage, non mais !

Streff s’attarde avec bonheur sur l’incroyable Maîtresse de Barbet Schroeder tourné en 1976 avec Bulle Ogier et Gérard Depardieu (encore). J’ai pu visionner plusieurs fois ce film très documenté sur le métier et je ne m’en lasse pas. Depardieu y joue l’amant d’une dominatrice et découvre cet étrange univers. La belle possède dans son salon une table basse qui s’ouvre sur un escalier permettant de descendre à l’étage du dessous où se trouve le donjon. « Ayant fait appel à des vrais masochistes, Barbet Schroeder a pu tourner les séquences de tortures et d’humiliation sans trucage (…) Ce choix délibéré pour d’authentiques pratiquants, fait de Maîtresse l’un des très rares films « cliniques » sur la « perversion » masochiste » précise Streff. Ce dernier résume bien en quoi consiste ma profession : « comédienne exemplaire se donnant corps et âme à son public particulier, la dominatrice professionnelle fait également figure d’analyste passionnée, s’efforçant toujours d’ « aller plus loin » et de débusquer les fantasmes encore enfouis, sans jamais porter un quelconque jugement de valeur. C’est là la part réservée à l’improvisation, au caprice de la « maîtresse ». Comme un psychanalyste face à son patient, elle doit connaître les limites à ne pas franchir pour éviter de « bloquer » le client, tout en essayant de repousser sans cesse ces limites. » C’est exactement ça ! Nous sommes sur le fil du rasoir tout en s’efforçant de ne pas l’être… rasoir.

Le bouquin parle des différentes déclinaisons de la femme dominante en évoquant la femme fatale et la vamp de Marlène Dietrich à Brigitte Bardot, « elles traversent majestueusement toute l’histoire du cinéma en reines triomphantes auréolées d’un pouvoir mystérieux qui fait ramper les hommes à leurs pieds. » J’ai apprécié l’hommage rendu à Mae West, « Vénus à la fourrure made in Hollywood », madone hypersexuelle et féministe, maîtresse d’œuvre de ses pièces, films et shows.

Allez ! Arrête de baver, gros benêt ! Va acheter le Masochisme au cinéma (20€). Et pour le cérémonial, n’oublie pas de glisser l’ouvrage sous tes boules de Noël, au pied du tapin. Attention aux aiguilles !

Le Masochisme au cinéma Jean Streff
Avec dans la partie centrale, des photos de films cités.

Cette publication a un commentaire

  1. jouet bertrand

    je vous conseille aussi Encyclopedie pratiques des mauvais genres de Celine de Chéné….

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